Monte Alegre, 25/03/16

Le nid d’Aigle d’Erice, en Sicile occidentale, tous les peuples de la Méditerranée y sont passés, et même les Normands. Tous y ont vu un lieu magique, marqué par le destin, un lieu de contact privilégié avec les puissances de l’au-delà. La même force d’attraction s’est-elle manifestée à Monte Alegre, en Amazonie ?

Paysage typique d’une ville baignée par le fleuve Amazone : Monte Alegre, mars 2016

Monte Alegre est aujourd’hui une commune plus grande que la Franche-Comté, pour… 55 000 habitants ; elle est située sur l’Amazone, en aval de Santarem. C’est surtout, à une quarantaine de kilomètres, un des seuls reliefs de la basse Amazonie, où il culmine à moins de 250 m (*).

La Serra do Ererê est un des seuls reliefs de l’immense État du Para, Monte Alegre, mars 2016

Cette « montagne » est le lieu des plus anciennes peintures et gravures rupestres d’Amérique du Sud. Elles ont d’accès assez difficiles, et je ne les connaîtrais pas sans l’exposition que leur a consacrée le Musée Emílio Goeldi de Belém. Ce qu’on en voit est magnifique. Les gravures sont comme souvent plus difficiles à distinguer, mais les fresques où dominent les rouges vifs tranchent sur les couleurs de la roche et de la forêt. Elles sont d’autant plus somptueuses qu’elles s’inscrivent dans ce paysage grandiose et y puisent une force surprenante.

Peintures rupestres sur la falaise de Monte Alegre, Musée Emílio Goeldi, Belém, mars 2016

Elles datent de 11 500 ans ; on n’a pas de traces de peuplement plus anciennes en Amazonie (pour l’ensemble du Brésil, les plus anciennes remontent à 17 000 ans). Sont-elles le vestige de la première occupation de la région, ou d’autres ont-elles été englouties par la forêt équatoriale ?

Ces peintures remontent aux premiers temps de la présence humaine en Amazonie, sans rapport avec ses populations actuelles, Musée Emílio Goeldi, Belém, mars 2016

On sait que pour nos ancêtres lointains – comme d’une autre manière pour Michel-Ange ou Le Gréco – l’art est sacré avant de revêtir une fonction esthétique ; il est d’abord un moyen magique d’agir sur le monde. On peut imaginer que les hommes qui ont les premiers fréquenté ces lieux, qui peut-être voyaient une montagne pour la première fois de leur vie, ont été éblouis par ces escarpements rocheux et y ont vu, comme à Erice, un lieu élu d’alliance avec les forces surnaturelles.

(*) L’altitude de Porto Velho, à 3 000 km de l’embouchure, est de 83 m, soit une pente moyenne de moins de 3 o/oo.

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