Rondon, 14/04/16

Qui sont les Français les plus célèbres au Brésil ? Mireille Mathieu, Napoléon, Zizou  ? Vous n’y êtes pas : Auguste Comte, Benjamin Constant (*) et Alan Kardec. Spiritisme et positivisme, les deux doctrines les plus antagoniques qu’on puisse imaginer. Du credo positiviste : Ordre et progrès, le Brésil a même fait sa devise, jusque sur son drapeau. Personnellement, à l’étouffoir de l’ordre, je préfère la liberté créatrice, à l’illusion du progrès continu de l’humanité, la réelle complexité shakespearienne de la vie...

C’est pourtant cette illusion scientiste qui a fait de Cândido Mariano da Silva – le Maréchal Rondon – la figure majeure d’un sud amazonien n’offrant guère d’autre intérêt que ses adorables habitants.

Cândido par Candido : portrait du Maréchal Rondon par Candido Portinari (1957). Seul son propriétaire et le Projet Portinari en connaissent la localisation... Avril 2016

Rondon (1865 - 1958), jeune militaire, participe à l’établissement des premières liaisons télégraphiques, et c’est lui qu’on charge en 1907 de construire la première ligne d’une Amazonie peu explorée, de Cuiabá au Rio Madeira. Tout en réussissant cette mission impossible, Rondon tisse des liens fraternels avec la plupart des peuples amérindiens rencontrés : il est le premier indigéniste du Brésil. Du positivisme, Rondon a d'abord retenu le meilleur : l’humanisme. Darcy Ribeiro, le « Lévi-Strauss brésilien », restera en contact permanent avec un devancier à qui il voue autant d’estime que d’affection.

Índios do Brasil, Tome III (1953), Maréchal Rondon, Musée Rondon, Porto Velho, avril 2016

Mêlé à de nombreux conflits par sa carrière, face à des Indiens hostiles, face à des troupes en rébellion, face aux Péruviens et aux Colombiens... Rondon excelle dans l’art de parler pour éviter de faire parler les armes.
Autant dire qu’il est vénéré dans l’État du Mato Grosso comme dans celui baptisé Rondônia en son honneur, voire dans tout le Brésil.

1914 : Rondon emmène l'ex-président Theodore Roosevelt à la découverte d'une rivière inconnue... Musée Rondon, Porto Velho, avril 2016

Quant à moi, j’ai enfin vengé Rondon : en bouffant le descendant du piranha qui lui avait bouffé un doigt…

(*) Benjamin Constant a au Brésil d’innombrables rues et instituts, et même sa ville, à la frontière du Pérou et de la Bolivie.

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