Maïs et compagnie, 06/10/16

Les civilisations méso-américaines ont été des civilisations du maïs ; au nord de l’Amérique du Sud, elles faisaient peu à peu place aux civilisations du manioc. Le maïs avait sa divinité : Cinteotl, sous 4 avatars pour les maïs blanc, jaune, rouge et noir. Initialement consommé sous forme de tamales, il l’est aujourd’hui d’innombrables formes, spécialement de galette ou tortilla.
Celles-ci sont une part essentielle des antojitos (les « petites envies ») avalées dans la rue ou dans une taquería (là où on mange des tacos).
Petite sélection…

Au commencement étaient les "mazorkas" (épis) – Image ucm.es

Arepa(s)
Du cumanagoto erepa : maïs.
C’est la tortilla du Venezuela et de Colombie. Le plus souvent non salée et froide (beurk), plus épaisse, souvent plus petite qu’un taco, parfois presque une boule : elle se décline sous des formes variées (simple ou au fromage (Aaah !), frite ou à la plancha…). Les petites accompagnent les plats, les grandes sont recouvertes ou garnies de viande, de saucisse, d’œuf, de fromage…

À l’avant-scène d’une (somptueuse) "bandeja paisa", 2 arepas (pas terribles), Medellín, septembre 2016

Burrito(s)
De la région du Guanajuato (centre du Mexique).
Intrus : c’est une tortilla de blé enroulée sur sa garniture.

Empanada(s)
Origine espagnole, participe passé de empanar : « mettre dans du pain »
Semi-intrus : le blé est plus courant que le maïs. La garniture (généralement salée : viande, poulet, etc.) est enroulée dans la pâte à pain, généralement pour former un chausson, puis frite ou cuite au four.

Enchilada(s)
Origine mexico-guatémaltèque, participe passé de enchilar : « mettre dans du piment », relever.
La tortilla est passée dans une sauce pimentée, rouge ou verte, puis garnie – ou servie en accompagnement d’un plat.

Fajita(s)
« Petite bande de tissu, petite ceinture ». Origine : nord du Mexique (qui incluait le grand Texas) – l’albollo andalou (de blé) y ressemblerait beaucoup…
Peut se faire avec de la farine de blé ou de maïs. La tortilla est recouverte de viande grillée (initialement de bœuf) découpée en lamelles, et de sauce.

Gordita(s)
« Petite grosse », origine mexicaine.
Cette tortilla très épaisse (et surtout très grasse) est ouverte et fourrée avec des chicharrones (sorte de rillons mangés chauds), de fromage, de frijoles*, etc. avant d’être frites (celles que j’ai mangées étaient frites avant).

Gorditas, Ciudad de México, août 2016

Huarache(s)
Origine mexicaine, sa forme de sandale indigène lui donne son nom. On connaît sa créatrice : Carmen Gómez Medina qui l’inventa vers 1920 à l’est de México (voir : tlacoyo).
La pâte incorpore des frijoles ou de la purée de frijoles avant d’être formée en ellipse et frite. On la fourre ensuite avec une garniture de viandes, frijoles, etc.

Huarache, Ciudad de México, août 2016

Mazamorra
Origine : bouillie servie aux galériens et marins espagnols
C’est le nom de nombreux desserts latino (ou de plats salés en Andalousie, en Colombie, etc.). Au Panamá, il est préparé à base de fécule de maïs, en Colombie, de maïs bouilli durant des heures, auquel on ajoute selon la région du sucre, de la panela (pâte de sirop de canne), du maduro (plantain mûr), etc.

Nacatamal(es)
Du náhuatl nacatl (viande) et tamalli (enveloppé) ; c’est le tamal émigré au Nicaragua.
La pâte incorpore directement viande, légumes, riz, piment, etc.

Nacatamal, Granada, Nicaragua, août 2016

Pan de cazón
Spécialité de Campeche (Yucatán) : « pain de chien de mer »
Empilement de 4 tortillas et d’une préparation de cazón (requin chien de mer) haché, de frijoles et d’une sauce à base de piment et d’avocat.

Pastel(es)
Le terme peut désigner aussi bien une sorte d'empanada salée, un gâteau ou… un bâton de pastel. Je ne suis pas sûr de la différence entre une empanada et un pastel. Intrus : en Colombie, le pastel ne serait pas fait de maïs (blé, manioc...), mais est-ce le cas partout ?…

Pupusa(s)
Du pipil pupusawa, déformation du náhuatl popotlax (grande tortilla, ou tortilla fourrée).
Cette (très) grande pâte de tortilla est recouverte d’une préparation de chicharrones, fromage, courgette, ou fromage et fleur de loroco, puis refermée, d’abord en cuvette, puis en chausson avant d’être cuite à la plancha ou dans un comal (grill d’argile ou de métal). Ne pas rater le spectacle de la préparation avant la dégustation !

Quesadilla(s)
Origine mexicaine, contraction de queso (fromage) et tortilla (galette).
La tortilla est doublée en demi-lune et fourrée de fromage, avec ou sans autres ingrédients. Grand souvenir de petit-déjeuner de quesadillas à Escárcega (Yucatán)

Quesadillas de crevettes, Ciudad de México, août 2016

Taco(s)
Origine mexicaine, peut-être dérivé du náhuatl tlaxcalli (galette de maïs).
Véritable signature du Mexique, c’est une galette de petite taille recouverte d’assaisonnements divers, souvent vendue par 4 ou 5, aussi bien dans les kiosques ou roulantes de rue, les taquerias que les restaurants de luxe. Le taco al pastor (taco du berger, garni d’une viande de porc rougeâtre façon kebab…) est très populaire.

Sous la garniture, un "orden" de 4 tacos, Ciudad de México, août 2016

Tamal(es)
Du náhtuatl tamalli, enveloppé.
Il y a plus de 2 000 ans, c’était déjà l’aliment de base des méso-américains, qui pouvaient le transporter aisément, à la chasse ou à la guerre… La pâte des tamales reste très souple et fourrée de viande, de légumes, de piments, de sauce, etc. ou de fruits. Les tamales sont enveloppés dans des feuilles de maïs ou de bananier.et cuites à l’eau ou à la vapeur.

Tlacoyo(s) ou Tlatoyo(s)
Du náhtuatl tlaoyo (empanada de maïs égrainé), origine mexicaine.
C’est l’ancêtre précolombien de la huarache, un peu plus étroit, garni de frijoles, de fromage, de nopal (figuier de Barbarie)…

Tortilla(s)
Étymologie : « Petit gâteau ». Les suffixes en -illo, -illa, sont typiques de l’époque de la conquête.
Quand le terme n’est pas générique, c’est le pain des Mexicains : elles sont servies dans une panière, entourées d’un linge qui les maintient au chaud, avec la plupart des plats des plats cuisinés et qu’on tartine volontiers sur ses tortillas.
Ne pas confondre avec la tortilla espagnole, à base d’œuf battu.

Tortillas chaudes dans leur panier, Ciudad de México, août 2016

Tranca(s)
« Gros bâton »
Intrus : au Mexique, ce n’est pas (seulement) une bite (éviter d’appeler une vendeuse Mama Tranca…), mais un sandwich baguette…

Et pour la bonne bouche : crepe(s) de chocolate
C’est bien de l’espagnol, d’origine franco-nahuatl (crêpe et xocoatl : « eau amère »)
Certes, elle est plutôt faite de blé, mais ne pas oublier que le chocolat est d’origine maya (où il était à la base des sauces dites mole) et y faire honneur, comme à Campeche chez Chocol-ha, devant un chocolat froid, en admirant l'architecture coloniale et les chocolatières anciennes…

Crêpes de chocolat, Chocol-ha, Campeche, juillet 2016

Ce billet est dédié à la mémoire de Norma Jean Bauerschmidt.

* frijol(es) : haricot (généralement rouge). Traduit, ça n’a plus le même goût…

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